Il y a deux jours, je me suis perdue. Ça arrive me direz-vous, rien d’insolite là-dedans... Oui mais pas n’importe où !
Pour le contexte, je devais passer la nuit chez mon copain, a priori une jolie soirée en perspective. Entre temps l’allocution de notre ami Macron nous a fait un peu l’effet d’une douche froide, et puis voilà que pour couronner le tout, grâce à un petit traître de léporidé ayant probablement semé des poils ici ou là, et malgré un ménage digne de ce nom, je pars dans une belle crise d’asthme, avec en gros, pour les chanceux qui ignorent l’effet que cela peut faire, l’impression de m’oxygéner avec une micro paille à moitié bouchée, pendant que mon mec se demande s’il ne s’est pas couché à côté de Dark Vador... Bon, on oublie la soirée coquine, si je peux déjà survivre à cette nuit ce serait déjà pas mal. Le temps défile et la crise ne passe pas vraiment, d’autant plus que je n’ai pas d’inhalateur et ai oublié mes antihistaminiques chez moi. J’ouvre la fenêtre, j’essaie de me détendre, je sens que les choses se calment un peu et après un bon moment finis enfin par m’endormir, au bord du lit pour être au plus près de l’air frais.
Tout aurait pu se finir gentiment ainsi si le vent n’avait pas fait grincer le volet... Je finis par me réveiller à moitié, mes poumons semblent alors plus coopératifs, je me relève donc pour fermer la fenêtre, la moitié de mon cerveau réveillée me disant qu’elle rejoindrait bien l’autre moitié rapidement... Tiens, c’est ma vessie qui a pris le relai... Je décide d’abord de l’ignorer mais pas moyen d’être tranquille, elle continue de se rappeler à moi... Ma moitié de cerveau à peu près active prend donc l’initiative d’aller aux toilettes tout en conservant l’autre moitié endormie, aussi elle préfère ne pas allumer les lumières... Bon je commence à connaître l’appartement, j’arrive à me diriger et arriver jusqu’aux WC sans me prendre un meuble. Même stratégie à l’intérieur des toilettes, je m’assois donc dans le noir mais au bon endroit. L’essentiel est fait, il ne me reste plus qu’à retourner m’écrouler sur le lit pour finir cette nuit déjà amputée de quelques heures de sommeil. Oui mais voilà, une moitié de cerveau ça ne suffit pas toujours... En me laissant nonchalamment tombée sur le trône, je n’avais apparemment pas fait attention à la direction de mes jambes... Une fois relevée, je m’avance donc au hasard dans la pénombre et tâtonne pour retrouver la poignée de la porte, mais les toilettes sont grandes... les normes handicapées c’est bien mais on a vite fait de louper la sortie visiblement, surtout dans le noir... Bon voyons, le lavabo doit être à ma gauche, la poignée juste après... Or sous mes doigts je ne reconnais rien de familier, tout n’est que surfasse lisse. Bêtement je commence à paniquer et promène mes mains partout devant moi pour retrouver si ce n’est pas la sortie, au moins l’interrupteur... en vain ! J’ai oublié de vous dire que mon copain, ayant emménagé il y a peu dans un appartement tout neuf, a profité d’avoir de grandes toilettes pour y stocker provisoirement la porte du couloir qu’il jugeait trop encombrante, ainsi que deux énormes structures d’étagères en acier qu’il n’a pas encore installées, celles-ci reposant sur la fameuse porte, elle-même appuyée sur le mur. Vous voyez où je veux en venir, je finis par reconnaître quelque chose qui ressemble à une poignée, ma moitié de cerveau plus ou moins en éveil pousse la porte qui ne bouge pas et se dit pendant quelques centièmes de seconde « tiens, je ne me souvenais pas qu’il fallait la tirer, celle-ci »... Et ce qui devait arriver arriva, je tire la porte vers moi, mais pas celle que j’espérais évidemment. La porte en question quitte son point d’équilibre, les étagères partent avec et viennent s’écrouler sur le mur d’en face, me frôlant au passage, le tout à 3h du matin dans un fracas de fin du monde et un cri primitif lâché par ma deuxième moitié de cerveau subitement arrachée du sommeil et désormais bien réveillée...
Alerté par tout ce raffut, j’entends mon copain accourir, j’aperçois enfin un filet de lumière dans un interstice puis la porte s’ouvre (la bonne cette fois). Enfin mon sauveur apparaît, me voilà délivrée. Il me voit désorientée, me prend dans ses bras et me demande ce que que je fabrique : « Euh... je me suis perdue... ».
Cette nuit restera gravée dans nos mémoires et dans le mur des toilettes qui porte les stigmates de cet incident. Pas sûre que j’aurai le droit de revenir dormir là-bas, à moins peut-être d’apporter un peu d’enduit...
Moralité : pas besoin de grands espaces pour se perdre.
À retenir également : tout ça c’est la faute du lapin !