« J’ai souvent pensé que la machine était mon seigneur et maître, dont je devais peigner les cheveux, tel un esclave. . Nous avons perdu la valeur que nous devrions avoir en tant qu’êtres humains, et nous sommes devenus une prolongation des machines, leur appendice, leur serviteur.. »(Extrait de« La machine est ton seigneur et ton maître » Jenny Chan – Sociologue - )
Vous le comprendrez au fil de la lecture, mon histoire, s’ est inspirée d’une analyse de la Sociologue , Jenny Chan, sur le fonctionnement de l’usine Chinoise Foxconn , plus grand fabricant dans le domaine de l’électronique qui produit Iphone et Playstation, pour Apple, Sony, Google,Microsoft , . L’envers du décor , c’est la mise en œuvre des pires formes d’exploitation, une organisation militarisée, une surveillance despotique et malheureusement le théâtre d’une série de suicides .
Grand père m’a appris que « Chaque coup de colère est un coup de vieux, chaque sourire est un coup de jeune » , alors, je m’applique à conserver le mien, autant que je le peux, malgré la chaleur et la cadence infernale de l’usine parfois impossible à tenir pour mes petites mains et qui m’expose si souvent aux réprimandes du patron !
Je viens juste de fêter mes 14 ans . J’ai grandi sans mes parents dans une ferme, aux côtés de grand-père.
Il m’a élevé seul , assumant sans l’ombre d’une plainte, ses responsabilités ; à cette époque encore, il incarnait la force à mes yeux . Je ne l’imaginais pas autrement qu’invincible. Mais le temps, a fait son travail et opéré quelques changements en lui. Son corps et ses mains , usés par des gestes répétés des milliers de fois, portent les stigmates d’un dur labeur . Je suis si fier de lui.
Aujourd’hui, c’est à mon tour de prendre soin de lui, de lui prouver mes compétences, de lui offrir ce repos, cette retraite si grandement mérités.
Bien sûr , le soir, derrière cette claustra qui sépare nos lits, je camoufle au mieux cet état de lassitude dans lequel je me trouve chaque nuit , aussi ignore-t-il combien je rêve de me rendre sur le chemin de l’école plutôt que d’aller pointer chaque jour en échange d’un si maigre salaire.
A lui, qui n’aura rien connu d’autre que la soumission, par peur des représailles, ai-je vraiment le droit de lui avouer que travailler dans ce monde d’adultes n’a rien d’un plaisir. Pire ! J’ai parfois le sentiment amer de me rendre dans un bagne un peu comme celui dont nous a parlé, un jour, notre Maître d’école.
Mais je n’ai pas envie de l’inquiéter alors je m’abstiens en me disant qu’après tout, mes petits malheurs d’usine valent toujours moins que les malheurs des rizières
De toutes façons, ici, les syndicats d’enfants n’existent pas .J’ai même entendu dire que, quiconque ose quémander une amélioration ou exposer un motif de revendication , sera fiché comme « fauteur de trouble » et inscrit sur une liste noire .
Pourquoi prendrai-je de tels risques ? J’ai bien trop de saisons à vivre encore.
J’attendrai le temps qu’il faudra ! Je sais qu'il y aura un printemps « magique » qui succédera à tous ces hivers de luttes, un de ceux qui m’ouvrira une porte vers plus d’épanouissements et me surprendra avec délice . Je ne laisserai pas ma jeunesse en plan dans cet atelier. J'en fais la promesse.