Et au milieu coule une rivière.
Film sorti en 1992, réalisé par Robert Redford. L’histoire de deux frères incarnés par Craig Sheffer, l’ainé, et Brad Pitt. Le premier ne connaîtra pas une carrière aussi importante que le second. Pitt est ici encore jeune et commence à prendre de la consistance.
Ce qui m’a plu dans ce film, car ce film m’a plu, c’est ce qu’il raconte. Une rivière. Plus précisément une allégorie de la vie sous forme d’une rivière. Les choses qui nous échappent, qui s’écoulent sans qu’on n’y puisse rien.
Le frère ainé a le rôle principal, celui du narrateur. Il raconte la vie heureuse d’une famille du Montana vers le début du XXème siècle. Le père, pasteur du village, et ses deux fils vivent pour la pèche à la mouche, dans une nature accueillante et magnifiquement filmée.
Tout prédispose cette famille à une vie heureuse. Pitt grandissant devient une personne magnétique. Tout semble lui sourire, il a tout pour lui. Son frère l’admire, comme toute le monde.
Pourtant, il a sa part d’ombre : il évolue dans les tripots clandestins et les relations douteuses qui vont le conduire à sa perte. Il meure assassiné très jeune, sans qu’aucun de ses proches ne sache comment l’aider voire ne se rendent compte de ses problèmes.
Et c’est là tout le sujet du film : peut-on réellement connaitre les gens ? Même ses proches les plus intimes ? Et peut-on les aider ? Le père présente peu avant sa mort un très joli sermon :
«
Il arrive dans la vie de chacun d’entre nous un moment où, voyant un être aimé dans le besoin, nous nous posons tous la même question. Je veux l’aider Seigneur ! Mais de quoi donc a-t-il besoin ?
Tant il est vrai que nous sommes rarement en mesure d’aider nos proches, soit que nous ignorions quelle part de nous-même donner, soit que la part que nous avons à donner ne convienne pas.
Ainsi ce sont ceux que nous devrions connaître, qui nous échappent.
Mais nous pouvons les aimer quand même. Les aimer sans les comprendre, les aimer d’un amour sans limite.
»
La rivière coule et nous échappera toujours. Comme nos proches.
La toute fin du film :
«
Alors, dans le demi-jour boréal du canyon, tout ce qui existe au monde s’estompe, et il n’y a plus que mon âme, mes souvenirs, les voix mêlées de la Blackfoot River, le rythme à quatre temps et l’espoir de voir un poisson venir à la surface.
A la fin, toutes choses viennent se fondre en une seule, et au milieu coule une rivière. La rivière a creusé son lit au moment du grand déluge, elle recouvre les rochers d’un élan surgi de l’origine des temps. Sur certains des rochers, il y a la trace laissée par les gouttes d’une pluie immémoriale. Sous les rochers, il y a les paroles, parfois les paroles sont l’émanation des rochers eux-mêmes.
Je suis hanté par les eaux.
»
Je me rends compte que ce qui m’a plu dans ce film n’est pas le film, techniquement. Pas la photographie (pourtant primée aux Oscar), pas la musique – anonyme, ni le jeu d’acteur, pourtant Emily lloyd, alias Jessie, est parfaite ; elle représente à peu de chose près l’incarnation de la femme parfaite à mes yeux. Ce n’est pas non plus le scénario, finalement assez convenu. Mais c’est le moyen de faire passer le message – des dialogues magnifiques ! – et le fond du message.
En tout cas, j’attaquerai le livre au plus tôt.