Quand on veut vendre un produit, il n'y a pas beaucoup de solution. Soit on est déjà suffisamment riche pour payer tout le développement du produit avant de le lancer sur le marché, soit on va demander à la banque des sous pour financer toutes les étapes en leur promettant juré-craché qu'une fois sur les étals, le produit se vendra si bien qu'on pourra leur rembourser tout jusqu'au dernier centime.
Ou bien il existe une troisième façon de faire. Créée en 2009, Kickstarter est l'une des plateformes de financement participatif (ou sociofinancement au Canada, c'est si chou) les plus connues. Vous en connaissez peut-être d'autres :
Kiss Kiss Bank Bank, qui a plus vocation à financer les start-up ou projets innovateurs
Ulule, plateforme française pour divers projets culturels, livres, BDs, albums, associations, ...
Qu'est-ce que le financement participatif ?
Il s'agit de présenter son projet au grand public. Ceux-ci peuvent investir dedans à leur échelle, la plupart du temps, en recevant en échange des récompense. Et bien souvent la récompense est le produit, s'il est un jour terminé. Mais pour pousser un peu les choses, le projet a un temps limité pour décrocher la quantité de thunes dont il a besoin. En une campagne de quelques semaines, il faudra avoir trouvé assez de monde qui croit au truc pour y dépenser de l'argent. Ce qui laisse la place à un super show à l'américaine pour attirer le chalant et convaincre que notre bidule est vraiment le meilleur du monde, venez nous verser tout plein de flouze ! Si au bout de cette période, le montant n'est pas atteint, tout le monde garde ses sous, et tant pis pour le porteur du projet, il rentre chez lui la queue entre les jambes, peut-être plus de chance la prochaine fois.
Kickstarter, lui, fait de tout. Il a permis de faire vivre des projets tech (comme des super machines à café du futur, des chaussures parfaitement imperméables, ...) des films (comme le film Veronica Mars, ou Kung Fury, cette oeuvre nanardisante fleurant bon les 80s) et des jeux vidéos évidemment (Shenmue 3, Divinity Original Sin 1&2, Yooka-Laylee, The Banner Saga, Hyper Light Drifter, TemTem, SuperHot, ...)
Mais si il y a un truc qui réussit bien à Kickstarter, ce sont les jeux de société. Le projet qui a rassemblé plus de financeurs du dimanche de toute la plateforme, tous les projets confondus, c'est le jeu Exploding Kittens qui a convaincu une foule de presque 220 000 personnes pour réunir une bagatelle de 8 782 571 $.
Forcément, quand on voit des chiffres pareils, ça fait baver un peu. Et les éditeurs de jeux de société se sont rendu compte d'un truc. Certains jeux sont difficile à vendre en boutique. Trop gros, trop chers, trop bizarres, demandant un matériel trop coûteux ou trop flamboyant. Mais ces jeux peuvent peut-être trouver leur public à travers le financement participatif, qui est parfait pour les projets un peu hors-normes. Et ils se sont rendu compte d'autre chose. En passant directement de l'éditeur au joueur, on saute pas mal d'intermédiaires, et donc on peut avoir une marge bien plus sympa.
La course était lancée. Des sommes indécentes ont été levées pour des jeux bourrés de petites figurines en plastique et de pelletées de cartes. La société derrière le jeu Zombicide a tellement bien profité du filon qu'elle va bientôt lancer sa 10ème campagne autour de ce jeu (extensions, déclinaison au moyen-âge, déclinaison dans l'espace, déclinaison au far-west, ...). Le jeu Gloomhaven a récolté 386 000 $ une première fois, est venu tenter une réimpression qui a récolté 3 999 000 $ puis a lancé une suite, Frosthaven, qui a décroché 12 969 608 $.
Aujourd'hui c'est des dizaines de jeux qui viennent tenter leur chance dans cet Eldorado. Beaucoup se plantent, certains réussissent et donnent souvent des jeux hors du commun, des pépites de gameplay, des titans pesant plusieurs kilos, parfois des futurs succès en boutique.
Je suis tombé dans cet engrenage en 2017, avec un projet porté par une toute petite maison d'édition française (cocorico), composée de 2 personnes, Ludo et Bruno, l'un à l'écriture et l'autre au dessin. Leur jeu, le 7ème Continent, avait déjà réussi une campagne sur Kickstarter, et ils lui avaient créé une extension, servant aussi de prétexte à réimprimer le jeu de base. Parce que oui, qui dit jeu hors norme dit souvent que le seul moyen d'avoir ces jeux est de passer par la campagne. Qui dure moins d'un mois. Ce qui pousse les gens à perdre toute rationalité de peur de manquer LE jeu du siècle. DU coup les fans étaient prêts et étaient présents. 7 millions de récoltés pour cette deuxième campagne. Pour ma ma première expérience, c'était une expérience grisante. Et c'est ainsi que je suis devenu accro. Et qu'aujourd'hui vous avez le droit à des topics comme Tranquility ou Chronicles of Crime.
Soupçonniez-vous cette économie parallèle ? Avez-vous déjà participé à une campagne ? Si oui pour quoi ? Avez-vous déjà joué à un jeu issu du financement participatif sans le savoir ?