Quelqu’un était entré dans la maison. Quelqu’un marchait dans le vestibule sur la pointe des pieds. Était-ce Sam ? Était-il venu à sa recherche ? Mais, dans ce cas, pourquoi ne l’appelait-il pas ?
Et pourquoi avait-il fermé la porte de la cave ?
Car la porte de la cave venait de se fermer. Elle entendit le déclic de la serrure et les pas qui s’éloignaient. L’intrus devait être en train de monter au premier étage.
Elle était enfermée dans la cave. Il n’y avait plus d’issue possible.
Plus d’issue, nul endroit où se cacher. Quiconque descendait les escaliers menant à la cave embrassait d’un coup d’œil tout le sous-sol. Et elle savait que quelqu’un, tout de suite, allait descendre ces escaliers. Elle en était sûre.
Si seulement elle avait pu se cacher, ne fût-ce qu’un instant, celui qui la recherchait serait obligé d’aller jusqu’en bas des marches pour l’apercevoir. Et alors, elle aurait peut-être le temps de se précipiter vers la sortie.
La meilleure cachette était la cage de l’escalier. Si elle pouvait se dissimuler sous de vieux papiers ou de vieux chiffons…
C’est à ce moment que Lila aperçut la couverture clouée sur le mur.
C’était une grande couverture indienne, vieille et très usée. Elle l’arracha et le tissu moisi se détacha des clous qui le maintenaient. Il tomba du mur, démasquant la porte.
La porte. La couverture l’avait complètement dissimulée. Sans doute, cette porte menait-elle à une autre pièce, probablement un cellier à l’ancienne mode. C’était l’endroit idéal pour se cacher et attendre.
Et l’attente ne serait pas longue. Car maintenant, elle entendait le bruit des pas assourdis qui se rapprochait, traversant le vestibule puis gagnant la cuisine.
Lila ouvrit la porte du cellier.
C’est alors qu’elle cria.
Elle cria à la vue de la vieille femme, une vieille femme décharnée, zux cheveux gris dont le visage ridé, parcheminé, lui adressait une obscène grimace de bienvenue.
— Madame Bates, haleta Lila.
— Oui.
Mais la voix n’émanait pas de ces joues creuses et tannées.
La voix venait de plus loin, derrière elle, du haut de l’escalier.
Lila se retourna et vit une silhouette informe et lourde, à demi cachée par la robe étroite qu’on avait trop rapidement enfilée sur d’autres vêtements. Affolée, elle contempla le châle qui ressemblait à un linceul, le visage blanc et peint, qui minaudait. Elle contempla encore les lèvres maladroitement fardées et les vit s’entrouvrir en une grimace convulsive.
Je suis Norman Bates, dit la voix aiguë et perçante. Et la main apparut, la main qui tenait le couteau. Et une forme avançait à petits pas.
Extrait de Psychose de Robert Bloch.