Et hop !
ma compo.
Curieusement, c'est le mot que j'ai proposé que j'ai eu le plus de mal à placer.. lol.
Thème : souvenir
Mots à placer : ambulance ; glisser ; oubli ; couloir ; inexorablement ; champs ; décalé.e
« Vous savez, les gens évoquent parfois une sorte de couloir blanc et lumineux », commença-t-elle avant de laisser à nouveau le silence s’installer. Comment pouvait-elle expliquer, quels mots pourraient bien exprimer ce qu’elle avait ressenti ?
En face d’elle, la psychologue l’observait avec patience. Elle avait cessé de prendre des notes, désireuse de respecter l’introspection de sa patiente.
« C’était très étrange vous savez, reprit-elle. Une seconde auparavant, j’avais conscience d’être dans l’ambulance. J’avais mal, j’avais peur. Et puis, brusquement, je me suis senti… glisser. Comme emportée par… un courant d’air chaud.
Chantal releva la tête, brièvement et croisa le regard de sa psychologue un instant.
« J’ai pratiqué le parapente, vous savez, précisa-t-elle. Et ce que j’ai ressenti, à ce moment-là, c’était finalement très similaire. La légèreté soudaine, le sentiment de liberté… »
Son regard se fit à nouveau trouble et douloureux. Elle finit sa phrase presque dans un murmure :
« … le harnais et la voile en moins. »
De nouveau, le silence. Et puis, après avoir laissé échapper un long soupir, elle reprit :
« Je sais que ça n’a duré qu’une poignée de seconde. On me l’a dit. Mais, moi, j’ai eu l’impression de glisser dans l’oubli, inexorablement, durant une éternité. Une longue glissade, dans une sorte de vide grisâtre, un tunnel insondable avec, au bout, un point lumineux. Mais ce n’était pas totalement blanc. Il y avait des touches de couleurs. Du vert, du bleu, du rouge, beaucoup de rouge…
Une nouvelle fois, comme une sorte d’illumination, une sorte d’évidence, elle finit par trouver ses mots.
« On aurait dit le tableau du champ coquelicots de Van Gogh » affirma-t-elle. « Mais vu de loin. »
Elle sourit à cette petite touche d’humour et la psychologue lui rendit son sourire.
Le silence s’éternisa un peu, alors la psychologue finit par lui poser une question.
« Vous aviez envie d’aller dans ce tableau ? »
Chantal fronça les sourcils et secoua la tête.
« Un instant, juste un très bref instant. Mais je me sentais comme décalée, comme si je n’étais pas entrée en phase, comme si le moment n’était pas encore venu. »
Dans un soupir retenu, des larmes perlant à ses paupières, la voix à la limite de se briser, elle expliqua :
« J’ai des enfants, vous savez. Ils ont besoin de moi. »
Elle releva soudain la tête et redressa les épaules, déterminée, presque dans une attitude de défi.
Alors, la psychologue comprit. Elle sut comment le cœur de cette femme alors en arrêt total avait fini par se remettre à battre avant même que les ambulanciers ait eu le temps de mettre la main sur le défibrillateur.