@ayamé a dit dans La Bible et ses lectures :
Entièrement d'accord. Seuls, les grands mystiques qui vivent vraiment leur foi au lieu de seulement l'intellectualiser sont capables
de cette relativité en conscience, et ce n'est qu'ainsi qu'ils deviennent de véritables humanistes, aptes à accepter les autres
dans leurs différences.
Oui !, mais ai-je faussement l'impression que tu penches cependant plus dans cette description vers une vision franciscaine contre une vision thomiste ? Or ce que je décrivais me semblait plus intermédiaire entre eux, voir plus proche de Thomas et d'une intellectualisation cependant très allégée et ouverte, dans la relation à la foi. En somme (non théologique donc - désolé, j'étais obligé de la faire...-), la constatation par la connaissance qu'il existe de nombreux plusieurs sens possibles à donner au monde. Ce qui procède de données anthropologiques (ethnologiques et historiques), assimilées avec la joie de la diversité des êtres, des cultures, et de données sur la nature, au sens de la physique, de la biologie, de l'astrophysique, etc. tout cela pour un retour à un émerveillement premier au monde (le beau), et à son intelligibilité (le vrai), dans une meilleure compréhension dialectique de la vérité du beau et de la beauté du vrai... D'où la sérénité d'une foi simple attachement personnel à un sens, à une secrète histoire, une ample et belle fabrication fictionnelle, à la star wars ou à la terre du milieu, dépassant un auteur originel, appropriation et construction collective bien comprise et acceptée comme telle, débarrassée alors de tout besoin d'ancrage de la fiction dans le réel. Et plaisir de la communion, comme pour les amateurs de game of throne ou de star trek lors d'une convention ! Presque un jardin épicurien, le plaisir de partager, entre initiés, le bonheur de cet imaginaire si vivifiant, si enthousiasmant, y compris en terme de valeurs, de comportements, d'idéaux, de modèles pour celles et ceux qui en ont encore parfois besoin.
Et sur l'humanisme... je trouve qu'il faut justement dépasser l'humanisme, ou peut-être veux-tu le reformuler... Mais pour moi il reste cet anthropocentrisme, relatif à une extension nombriliste pour les progrès de l'esprit humain de cette terrible erreur de la genèse qui soumettait la nature à l'homme et le plaçait au-dessus de celle-ci, "comme maître et possesseur" de celle-ci ! Malheureusement, les humanistes, beaucoup de ceux-ci en tout cas, étaient et restent les deux pieds dans la bible ! Dans ce qu'elle reprend de plus dommageable pour l'être humain premier néolithique (ppna).
" au-delà des divergences culturelles et historiques de leurs traditions respectives, 7 sages s'appuient sur leur expérience personnelle, inspirés par ce que les philosophes de l'Antiquité appellent " l'âme du monde ", la force bienveillante qui maintient l'harmonie de l'univers..."
La religion devait servir à atteindre la sagesse et cet objectif a été perverti pour devenir, comme tu le dis plus loin :
" ce sacré justificateur de l'ordre social...Est désigné comme sacré, par ceux qui en profitent ou espèrent en profiter,
ce qui justifie l'ordre social !"
Et bien, la religion..., mais là il faudrait peut-être distinguer entre plusieurs d'entre-elles, n'a pas toujours été de cet acabit. Et il y a eu, justement des innovations dangereuses qui ont été contournées ensuite mais qui sont revenues par la fenêtre. Disons qu'elles n'avaient pas été tant contournées que cela, et qu'une fois que le vers est dans le fruit...
Mais pour moi, Lenoir ne désacralise pas tout, il remet le sacré à la place qu'il n'aurait jamais dû quitter :
celle de l'étonnement au monde, comme tu le dis si bien.( J'adore t'écouter parler, éhé ).
Merci, te re-lire est une réelle stimulation !
Mais, de ce qui précède (le vers / le fruit), le conflit entre la lumière et les ténèbres est plus complexe qu'un sacré qui n'aurait qu'une fois basculé... Et notons que les grands mythes modernes que je citais (Star wars, Game of throne, la Terre du Milieu), réimplémentent chacun à sa manière, très proche, ce rapport de l'ombre à la lumière (et pas seulement du bien au mal) : la nuit est sombre et pleine de terreur vs R'hllor le maître de la lumière (du feu !!!), le sabre lumière (light saber, qui n'est pas un 'sabre laser') vs le côté obscur, la lumière d'Eärendil vs l'ombre du mordor.
Notons que la lumière se manifeste souvent par une arme, défensive (au moins dans son idée première)... repoussant l'ombre qui menace en fait plus souvent de submerger les héros de l'intérieur, comme une part d'eux même.
Rien de nouveau chez Arendt donc quand elle parle de la banalité du mal, qui ne reprend donc que ce que comprends la première sagesse perse sur la part en soi d'Ormutjz et Ahariman. Mais une sagesse qui vient du fond des âges, très peu nouvelle mais plutôt, déjà, elle-même redécouverte luttant contre ce qu'avait mis en place l'apparition de l'état, de la hiérarchisation.
Et j'ajouterai que la philosophie des "lumières"... qui veut se battre contre les âges "sombres" et "l'obscurantisme" est l'occasion d'une redécouverte de Zoroastre (les textes de l'Avesta sont traduits en français en 1771), qu'on voit se manifester dans la culture de l'époque entre le Zoroastre de Rameau (1749) et Die Zauberflüte de Mozart (1791). Mozart, franc maçon, y parle du grand sage des franc-maçons, nommé dans la Flute : Sarastro... ! Et dont le serviteur, détourné par la reine de la nuit se nomme Monostatos...
Je te laisse deviner les implications...
Un étonnement, un émerveillement même, qui doit imprégner tout l'être : autant le corps que l'esprit et qui va bien au-delà de la systématicité, ce qui évite la sclérose des concepts jusqu'à, chez certains, devenir une idéologie délirante et fanatique.
Il libère le sacré du matérialisme anthropique, pour reprendre tes mots car il a bien compris que l'obligation religieuse formelle
enferme les hommes au lieu de les libérer et de les épanouir.
Le mieux est de libérer du sacré tout court, cela évite les retours intempestifs, les morceaux qui restent dans les dents, etc.
Je dois préciser ma pensée : il n'est nullement question de transexualité dans le triple visage de Shiva.
Chaque humain a en lui les 2 énergies, yang et yin, masculine et féminine, dans des proportions différentes
selon que l'on est homme ou femme.
C'est ainsi que selon les proportions, on en voit certain.e.s qui sont des hommes féminins et des femmes phalliques ;).
Le visage du milieu de Shiva irradie une tranquillité sereine parce qu'il sait faire cohabiter harmonieusement en lui
ces 2 forces qui sont non pas contraires ni contradictoires, mais complémentaires.
Il est le visage de " l'âme du monde ".
Ah mais qui dit que justement le transexualisme n'est pas en partie, inconsciemment souvent même, une quête de réunion du yin et du yang, une façon de reformer l'androgyne originel d'Aristophane (Platon, le banquet), composé de la lune féminine (l'ombre ?) et du soleil masculin (la lumière?), pour dépasser le désir vers une ataraxie qui permettrait d'atteindre l'agapé ?
Bon, certes je concéderais aisément que le transexualisme n'en est pas encore là... Mais... sait-on jamais...
Pfff : Léo, tu écris des pavés et du coup, suis obligée de faire de même.
Obligée ? Que nenni, c'est un réel plaisir de discuter avec toi.
Et c'est donc un partage véritable !