J'aimerais parler d'un homme que j'admire énormément : Hubert REEVES.
Petit rappel : Hubert Reeves, né le 13 juillet 1932 à Montréal, est un astrophysicien, vulgarisateur scientifique et écologiste canadien naturalisé français. Il raconte dans ses livres, ses spectacles et ses chroniques la naissance de l’univers, celle de la Terre et de la vie, la belle histoire, et la moins belle …
" Deux forces très puissantes et contradictoires sont à l’œuvre, aujourd’hui.
La première est délétère : la détérioration de notre environnement.
La seconde est prometteuse : une prise de conscience planétaire qui alimente une force de restauration de la nature.
Ce qui me rassure, c’est que ce mouvement est de plus en plus important.
Je souhaite léguer un héritage qui s’inscrira dans le sillage de cette force de restauration de notre environnement.
J’espère avoir contribué humblement à cet important éveil des consciences."
https://www.quebecscience.qc.ca/environnement/entrevue-hubert-reeves-optimiste-lucide/
Dans cette rubrique intitulée Écrits, Hubert Reeves livre des textes plus intimes pour nous raconter la Terre, célébrer la vie, avec lucidité, espoir et émerveillement mêlés.
Exemples avec " Visions du monde " :
Au plus lointain, j’ai vu l’explosion fulgurante d’un chaos torride et, dans un océan éblouissant de lumière, un magma de matière informe se répandre. Puis, sous mes yeux étonnés, de gigantesques masses nébulaires se sont disloquées.
Les fragments, s’enroulant sur eux-mêmes, se sont lentement dessinés en spirales bleutées,
et tout au long de leurs bras, de fantastiques explosions d’étoiles ont projeté dans l’espace, avec une force inouïe, des moissons d’atomes multicolores.
J’ai observé dans les abysses océaniques des torrents de matière opaque s’éjecter des cheminées volcaniques, et d’immenses colonies d’organismes s’agiter en cadence auprès de cette manne sulfureuse.
J’ai assisté aux combats brutaux de cerfs pour la femelle qui portera leur semence et veillera sur l’avenir de la lignée.
Par ces spectacles, j’ai mesuré la puissance du ferment d’organisation dont la nature est possédée.
Et j’ai goûté en moi une saveur exaltante faite d’enthousiasme et de reconnaissance.
Mais quand j’ai été horrifié devant les amas de cadavres dans les camps d’exterminations, j’ai été envahi d’un sentiment de grande perplexité.
Où l’aventure cosmique s’était-elle fourvoyée ? Ou bien n’avais-je pas été simplement le jouet d’une illusion, d’un rêve en couleurs ? Du choc de ces visions contradictoires est née en moi une nouvelle idée de notre existence.
Il y a quelque chose à faire de ces quelques décennies que la nature nous accorde :
prendre résolument, et sans faillir, le parti d’embellir la réalité.
Et avec " Dame Nature nous veut-elle du bien ? "
Cette question peut se décliner sous différents aspects.
D’abord envisageons l’existence d’une transcendance cosmique, une sorte de principe impersonnel comme en évoquent Einstein, Spinoza et les taoistes, une entité qui organise la matière selon des lois immuables … Inutile de l’honorer, de la prier, d’espérer un signe : il n’y a personne au bout de la ligne. Cette vision de la transcendance aurait été tout à fait adaptée à la période qui s’étend du Big Bang à l’apparition de la vie sur Terre, il y a 3,8 milliards d’années.
Après cette période, ce n’est plus si évident : d’autres facteurs entrent en jeu.
Envisageons maintenant la possibilité d’une nature personnalisée. La nécessité pour les animaux prédateurs de tuer pour se nourrir et le fait que tous les coups sont permis
(nature rouge de griffes et de dents selon Heackel) laissent planer un doute sur ses dispositions à notre égard.
Pourtant, qui a vu l’incroyable délicatesse avec laquelle la mère crocodile transporte ses fragiles nouveaux nés entre ses dents acérées, pourrait supposer la présence d’une composante affective dans la vie animale.
Mais la théorie de l’évolution fondée sur la sélection naturelle explique de tels comportements : il s’agit d’assurer la survie de la progéniture.
L’étape suivante de l’histoire se situe il y a moins de dix millions d’années avec l’apparition de la compassion chez les hominiens. Quelle que soit l’explication qu’on accorde à ce comportement, il reste un fait incontournable : la nature a engendré un être sensible à la souffrance des autres humains même sans lien de parenté direct, et aussi à la souffrance des animaux, et qui tente de la réduire.
Corollaire important : Homo sapiens se rend compte du fait que, par sa propre activité, son avenir et celui de ses descendants sont en péril. Il peut s’investir pour essayer de conjurer ce funeste sort. Ce fait ouvre une importante fenêtre sur le comportement de la nature : notre prise de conscience de la possibilité d’agir pour nous tirer du mauvais pas signifie que, quelque part, la nature nous veut du bien.
(13 novembre 2011).
Il a aussi écrit des billets de bonne humeur comme " Une occasion à ne pas rater ". Publié le 25 mai 2020 dans Le Point.fr.
https://www.hubertreeves.info/chroniques/lpt_bbh/
La fin de la guerre de 39-45, on s’en souviendra, correspond à la période où les femmes acquièrent le droit de vote en France et où la Sécurité sociale est instaurée dans ce pays.
Les historiens nous disent que ça n’est pas un hasard. Les changements importants dans la structure sociale d’un pays ont souvent coïncidé avec des événements qui ont entraîné
des bouleversements majeurs dans la vie et dans les habitudes des citoyens.
En temps ordinaires, les structures sociales atteignent facilement une rigidité telle qu’elles résistent à toute tentative de modification d’une importance quelconque, même, si de l’avis général, ces modifications s’imposent.
Les avantages qu’elles pourraient amener ne semblent pas toujours devoir compenser les désavantages qu’elles pourraient entraîner.
Ces dernières années, les critiques contre la prédominance de l’économie dans notre société et la fragilité que cela provoque se sont multipliées. Le spectre de la crise de 1929 a été ravivé à de nombreuses reprises. Et encore en 2008.
Allons-nous retomber dans nos mauvaises habitudes ?
Dans ce contexte, l’épidémie du coronavirus — Covid19 — nous apparaît maintenant comme un chamboulement de grande dimension, propice à d’importantes et favorables innovations.
Sommes-nous, aujourd’hui, sur le point de vivre à nouveau sous le joug de la logique économico-financière ?
Allons-nous retomber dans nos mauvaises habitudes ? Allons-nous retrouver, comme avant, la priorité du profit sur la santé de tous, responsable entre autres de l’état déplorable de nos hôpitaux ?
Cette note a l’ambition de faire valoir l’importance du moment que nous vivons.
À cause de l’impact majeur de cette pandémie, ce temps présent est particulièrement propice
à une évolution majeure de notre façon de coexister avec la nature pour garder notre planète habitable et agréable.
Même si une urgence sociale prédomine et doit être prise en compte, puissions-nous ne pas rater cette occasion !
Pour en découvrir plus, voici le site d'où sont issus ces extraits :
https://www.hubertreeves.info/ecrits/
Mais Hubert Reeves est aussi un vrai mélomane. Il a collaboré avec l'Ensemble Calliopée dans cette oeuvre :
" Mozart et les étoiles " entre autres.
Pour finir, vidéos de 2 de ses entretiens :
" S'il n'y a pas l'écologie, l'économie s'effondre ".
" Arrêtons d'axer tous nos efforts sur le profit ".
" Il y a de plus en plus de luttes qui réussissent, tout n'est pas foutu ".