Mais le choix a été difficile, j'aime beaucoup les deux autres extraits, dans des genres très différents ! De la solitude martienne à la solitude dans le couple...
Whoa, choix très compliqué en effet ! Les trois extraits sont top.
Mais je rejoins Lea, j'ai trouvé le dernier passage hyper parlant, on s'identifie direct au narrateur même si on n'a jamais été dans sa situation exacte, mais juste le côté "grand moment de solitude". Surtout avec la phrase "Et plus j’attendais, plus cela devenait impossible, ils se seraient demandé pourquoi j’avais attendu", on a tous vécu ce genre de situation où on n'a pas réagi assez vite et où plus on attend plus c'est gênant .
Donc... Je vote pour Mai Tai (mais je félicite ses deux adversaires pour leurs excellents choix !).
Je vous conseille le livre qui est vraiment très drôle, malgré les petites pointes de mélancolie et la solitude du héros, en toutes circonstances. Je devrais dire de l'anti-héros
@shanna c'est ça, les situations gênantes du quotidien
Merci pour cette victoire ! Et un bisou à mes adversaires, j'ai aimé leurs extraits, et c'était particulièrement bien qu'on ait choisi des styles si différents
Soudain, et presque de sous le bras d'Andréï Filippovitch qui se tenait alors juste à la porte, on vit jaillir dans la pièce Monsieur Goliadkine-cadet, qui s'agitait, haletait, s'épuisait au service, empreint d'un air grave, officiel et résolu – il se retrouva tout de suite devant Monsieur Goliadkine-aîné, lequel pouvait s'attendre à tout, sauf à une agression pareille...
Les papiers, Iakov Pétrovitch, les papiers...
Son Excellence demande s'ils sont prêts, se mit à pépier, à mi-voix, en toute hâte, l'ami de Monsieur Goliadkine-aîné.
– Il y a Andréï Fillopovitch qui vous attend...
Je n'ai pas besoin de vous pour le savoir, qu'il m'attend, répondit Monsieur Goliadkine-aîné, lui aussi, très vite et à mi-voix.
Non, ce n'est pas ce que je veux dire ; ce n'est pas du tout ça, Iakov Pétrovitch ; je compatis, Iakov Pétrovitch, je suis mû par une pleine compassion...
Que je vous demande humblement de m'épargner. Permettez, mais permettez donc...
Vous les envelopperez, bien sûr, n'est-ce pas, dans une petite enveloppe, Iakov Pétrovitch, et, à la page 3, vous mettrez un marque-page, permettez, Iakov Pétrovitch...
Mais, vous, permettez, enfin...
Mais il y a une petite tachounette d'encre Iakov Pétrovitch, bous ne l'avez pas remarquée, la petite tachounette d'encre ?...
Là, Andréï Fillopovitch appela Monsieur Goliadkine-aîné pour la deuxième fois.
Tout de suite Andréï Fillopovitch ; j'arrive juste tout de suite, je suis là, je...Monsieur, mais est-ce en chinois que je vous parle ?
Le mieux ce serait de la gratter au couteau ; Iakov Pétrovitch, faites-moi plutôt confiance ; n'essayez pas vous-même, Iakov Pétrovitch, confiez-vous à moi – moi là, tout de suite, au couteau...
Andréï Fillopovitch appela Monsieur Goliadkine pour la troisième fois.
Mais, voyons, où est-elle, votre tachounette ? Il n'y en a pas du tout, je crois, de tachounette !
Une petite tachounette énorme, la voilà ! Voilà, permettez, je viens de la voir ; voilà, permettez...non mais, permettez-moi seulement, Iakov Pétrovitch, moi, un petit peu, ici, au couteau, par compassion, Iakov Pétrovitch, au couteau, du fond du cœur...voilà, et on n'en parle plus.
Là, d'une manière tout à fait inattendue, Monsieur Goliadkine-cadet, soudain, sans prévenir, dominant Monsieur Goliadkine-aîné dans la lutte instantanée qui éclata entre eux, et, en tout cas, absolument contre son gré, s'empara du papier que demandaient les supérieurs et, au lieu de le gratter au petit couteau du fond du cœur, comme il assurait traîtreusement en avoir l'intention à Monsieur Goliadkine-aîné – il le roula très vite, se le fourra sous l'aisselle, et, en deux enjambées, se retrouva auprès d'Andréï Fillopovitch, qui n'avait remarqué aucun de ses coups fourrés, puis il fila avec lui jusqu'au bureau du directeur. Monsieur Goliadkine-aîné resta comme fixé sur place, le petit couteau dans la main, et comme s'il s'apprêtait à gratter quelque chose avec...
Extrait de Le Double de Fiodor Dostoïevski.
Extrait de Lapin
Tobie mesurait un millimètre et demi, ce qui n’était pas grand pour son âge. Seul le bout de ses pieds dépassait du trou d’écorce. Il ne bougeait pas. La nuit l’avait recouvert comme un seau d’eau.
Tobie regardait le ciel percé d’étoiles. Pas de nuit plus noire ou plus éclatante que celle qui s’étalait par flaques entre les énormes feuilles rousses.
Quand la lune n’est pas là, les étoiles dansent. Voilà ce qu’il se disait. Il se répétait aussi : « S’il y a un ciel au paradis, il est moins profond, moins émouvant, oui, moins émouvant... »
Tobie se laissait apaiser par tout cela. Allongé, il avait la tête posée sur la mousse. Il sentait le froid des larmes sur ses cheveux, près des oreilles.
Tobie était dans un trou d’écorce noire, une jambe abîmée, des coupures à chaque épaule et les cheveux trempés de sang. Il avait les mains bouillies par le feu des épines, et ne sentait plus le reste de son petit corps endormi de douleur et de fatigue.
Sa vie s’était arrêtée quelques heures plus tôt, et il se demandait ce qu’il faisait encore là. Il se rappelait qu’on lui disait toujours cela quand il fourrait son nez partout : « Encore là, Tobie ! » Et aujourd’hui, il se le répétait à lui-même, tout bas : « Encore là ? »
Mais il était bien vivant, conscient de son malheur plus grand que le ciel.
Il fixait ce ciel comme on tient la main de ses parents dans la foule, à la fête des fleurs. Il se disait : « Si je ferme les yeux, je meurs. » Mais ses yeux restaient écarquillés au fond de deux lacs de larmes boueuses.
Il les entendit à ce moment-là. Et la peur lui retomba dessus, d’un coup.
Ils étaient quatre. Trois adultes et un enfant. L’enfant tenait la torche qui les éclairait.
– Il est pas loin, je sais qu’il est pas loin.
– Il faut l’attraper. Il doit payer aussi. Comme ses parents.
Les yeux du troisième homme brillaient d’un éclat jaune dans la nuit. Il cracha et dit :
– On va l’avoir, tu vas voir qu’il va payer.
Tobie aurait voulu pouvoir se réveiller, sortir de ce cauchemar, courir vers le lit de ses parents, et pleurer, pleurer... Tobie aurait aimé qu’on l’accompagne en pyjama dans une cuisine illuminée, qu’on lui prépare une eau de miel bien chaude, avec des petits gâteaux, en lui disant : « C’est fini, mon Tobie, c’est fini. »
Mais Tobie était tout tremblant, au fond de son trou, cherchant à rentrer ses jambes trop longues, pour les cacher. Tobie, treize ans, poursuivi par tout un peuple, par son peuple.
Extrait de Tobie Lolness, de Thimothée de Fombelle.
Voilà, vous pouvez à présent voter pour votre extrait préféré %(#00FE7E)[**Je vote pour Egon**] %(#26619C)[**Je vote pour Lapin**]
Vous avez jusqu'à demain 11 juin à 18h52, soit 24h, pour faire votre en choix en copiant le code qui correspond.
Mon enfant intérieur ne résiste pas devant ce genre d'histoire et il en voudrait encore bien davantage.
J'adore Dostoïevski., mais Tobie m'a donné envie de lire la suite de ses aventures.